J'ai retrouvé Hugo mardi. Et je suis encore plus perdue, et en même temps non, j’ai comme vu à nouveau le chemin. Parce que c'était formidable. Parce que l'évidence de nous deux s'est imposée. Parce qu'il m'a mise dans une bonne humeur folle, parce que j'ai retrouvé avec une joie pétillante ses yeux et ses lèvres, sa voix et ses mots.
Je l'attendais à la sortie du train. Sans lui dire, je suis venue le chercher, j'ai pris le risque de ne pas trouver le bon quai, en cherchant comme une grande, toute seule, sur le panneau d'affichage qui m'emmêle avec ses chiffres et ses lettres partout.
J'ai eu envie. Pour voir. Comment ça serait. De le retrouver après une semaine.
Alors, quand je l'ai vu descendre en premier d'un wagon, tout juste le train arrêté, quelque chose en moi s'est soulevé, et j'ai souri. Mes yeux n'ont pas décollé de sa silhouette tout au loin, même lorsque la foule a envahi le quai. Il ne m'a pas vue tout de suite, et puis soudain, ses yeux ont trouvé les miens.
Et il a souri. La lumière a envahi son visage calme, et il a accéléré le pas. Je l'ai senti heureux de me voir ici, vraiment. Alors, tandis qu'il marchait, doublait des voyageurs, moi aussi, j'ai marché, et j'ai emprunté à contre-courant le flot humain.
Les derniers mètres, on a couru.
Et j'ai trouvé ses bras, qui se sont refermés sur moi.
Son odeur m'a imprégnée, fragrance si familière, si... mienne. Sa tête sur la mienne, sa bouche dans mes cheveux, et sa voix qui murmure : "Viva".
Je me suis sentie à ma place, dans ses bras. Intensément.
Soudain, il m’a regardée, et une petite lueur s’est allumée dans ses yeux. « Tu sais quoi ? » Il m’a regardé avec un air mutin, et a continué : « Viens. » Son sac de baroudeur sur le dos, il a pris ma main, et m’a entraînée à travers la foule. « On va où ? », je lui ai demandé. « Tu vas voir. On passe chez moi, je pose mes affaires, et puis je t’emmène dans un endroit formidable. »
On est dans la rue, et on marche, vite.
- On dirait qu’on va à un rendez-vous important, tellement on va vite, je dis.
- Mais c’est un rendez-vous important. Un rendez-vous pris avec nous-mêmes.
Et il me sourit.
Les escaliers grimpés quatre à quatre, il ouvre à peine la porte et, sans lâcher ma main, jette son sac dans l’entrée, dans un grand geste chevaleresque ; je ris. « Allez, hop, on y va ! », et nous voilà repartis pour dévaler les étages.
Seulement, la minuterie s’arrête tout à coup. Et nous voilà dans le noir. Comme dans les dessins animés, juste les yeux qui restent visibles, et les paupières qui clignent, cling, cling. Tous les deux debout dans l’escalier, arrêtés dans notre course folle.
La pénombre autour de nous.
Je distingue à peine son visage à côté de moi. Je tends mes mains devant moi, et tâtonne à la recherche de son corps, pour m’y appuyer un peu, histoire de ne pas perdre l’équilibre.
Son bras vient soudain enserrer ma taille, et me rapproche de lui. Pour s’arrêter à quelques centimètres de sa peau.
- C’est malin, on est dans le noir… me murmure-t-il dans un souffle.
Je ses lèvres venir rejoindre mon cou, doucement.
Il m’enlace, encore plus, et m’entraîne à rebours au fil des marches. Une, deux, trois, son palier, sa porte qui s’ouvre, et nous qui entrons. Le noir toujours, et sa peau contre la mienne.
A tâtons dans la pénombre, des pas qui se dirigent sans savoir où. On bute en riant contre un pan de mur, et puis soudain, je le sens qui s’arrête.
Sa simple respiration, tout près de mes lèvres. Et son corps qui frémit.
Tout près. Sa main remonte jusqu’à mes cheveux, et me caresse
- Viva
Tu m’aimes. Hugo, tu m’aimes.
- Je n’y peux rien. Même si pour toi, ce n’est peut-être pas toujours pareil, même si tu as peut-être parfois envie d’aller ailleurs. Je ne sais pas. Je t’aime et je n’y peux rien.
Ses lèvres viennent trouver les miennes, si doucement. Si doucement. Je me rappelle notre premier baiser, la légère hésitation qu’il avait eue, comme pour s’assurer que je le voulais bien, et le ‘oui’ que j’avais murmuré. Tant de douceur en lui. Oui, c’est ça, cette douceur.
Et cet amour. Amour qui vibre en lui et me fait frissonner, tant il est vrai, présent, réel.
Alors, je le serre contre moi. Si fort. Parce que je réalise à quel point il m’aime, à quel point je l’aime. Aussi. Comme je peux être fragile et volage, parfois. Sans le vouloir. Sans le souhaiter vraiment. Je réalise comme nous avons failli laisser passer notre chance, comme nous avons failli laisser vraiment mourir ce qui nous unissait.
C’était peut-être simplement ça, qu’il nous fallait. Sentir à quel point on a besoin de l’autre, et à quel point on est heureux de le revoir, après une absence d’une semaine. Pour mieux comprendre à quel point on y est attaché.
Je partais à la dérive, je laissais la routine s’installer. Lui aussi. Nous avons failli nous laisser étouffer.
Et là, soudain, je réalise, je sens, comme mon cœur bat, à m’en étourdir les sens, dans ma poitrine. Un air immense insufflé dans mon thorax, de l’air, de l’air.
Je l’aime.
Je l’aime tellement.
Le canapé accueille nos respirations, nos corps enlacés. Les vêtements qui tombent sans bruit.
Et il m’aime, là. Tout près.
Et je l’aime.
Je ne le laisserai plus jamais partir, pour se perdre de moi. Je ne me laisserai plus, le sentir sortir peu à peu de moi. Plus jamais.
Commentaires :
Re: Hm..
:)
Elle me fait si peur, cette routine... Même si parfois, elle peut être délicieuse. Enfin, disons que le quotidien est formidable. Mais la routien, l'habitude, toutes ces choses faites dans la répétitions mécanique, ce sont eux, les tue-l'amour.
Merci Paradoxa... Au fait, t'es passée où?
Ah non, j'suis bête, on peut venir chez toi par l'url de ton pseudo... huhu ^^
Ton texte fait plaisir à lire, on te sent bien déterminée dans ton choix à présent !
Je te souhaite beaucoup de bonheur avec Hugo !
Bises
CyCy
Re:
Merci!... J'ai juste un peu peur de revoir Eloi, mais je me sens plus forte, à présent. Je crois qu'il n'y a aucun risque que je "dévie"! :)
Bizz à toi!
Parce qu'il fait frémir même ceux qui sont étrangers à l'histoire...
Relis toi... et n'oublie pas... jamais...
Bises à toi....
Re:
Je crois qu'en effet, je garderai cet écrit comme "mémoire", comme... mémoire d'amour.
Bizz! :)
Hm..
Un véritable film.
Le film de ta vie.
Cet article m'a fait sourire et penser.
Penser à une amie qui te lit et qui vit un peu cette situation.
La routine.
Cette chose désagréable qui tue les passions...
Savoir redonner de la passion est le plus beau geste d'amour qu'on puisse faire.
Je suis heureuse que tu es retroubée ta voie.
Amicalement